+ 4 Questions/Réponses – Paracha ‘Hayé Sarah :
1°/ Pourquoi est-ce que cette paracha s’appelle : « la vie de Sarah » (‘Hayé Sarah) alors qu’elle commence par la mort de Sarah, et pourquoi la paracha ultérieure de Vayé’hi, qui signifie : « Yaakov vécut » (Vayé’hi Yaakov), traite de la mort de Yaakov?
-> Le rav Zalman Sorotzkin (Oznaïm laTorah) suggère que cela est fait afin de nous apprendre que la véritable vie n’est pas celle dans ce monde.
Mais plutôt, la vie commence après que l’âme quitte le corps et entre dans le monde à venir.
Ainsi, Sarah et Yaakov sont morts dans ce monde, et ils ont alors pu commencer leur vraie vie.
[Ce monde n’est qu’un bref lieu de passage vers notre endroit de vie éternelle, comme il est écrit (Pirké Avot 4,16) : « Ce monde ressemble à un vestibule devant le monde à venir [éternel]. Prépares-toi dans le vestibule [en accomplissant des bonnes actions, des mitsvot dans ce monde] pour entrer dans le palais. » ]
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-> Par ailleurs, on peut remarquer qu’il est écrit :
– « les années de la vie de Sarah » (שני חיי שרה – v.23,1)
– « les années de la vie de Yichmaël » (שְׁנֵי חַיֵּי יִשְׁמָעֵאל – v.25,17)
Sachant que Rachi commente : les années de la vie de Sara = Toutes égales pour le bien.
Comment peut-on expliquer une telle similitude dans les mots?
-> Selon le Daat Zékénim, Yichmaël a fait une sincère téchouva sur toutes ses fautes (cf. Rachi 25,9), et il a alors été considéré comme une nouveau-né avec aucune faute à son actif.
[plus encore, une téchouva faite par amour, transforme nos fautes en mérites!]
Ainsi, d’une certaine façon, ses années étaient « toutes égales pour le bien », comme celles de Sarah.
Nos fautes ne pourront jamais se comparer à celles très graves de Yichmaël.
=> Si lui a réussi à faire une téchouva totale, nous ne devons donc jamais désespérer de pouvoir également faire une téchouva totale.
Comme l’affirme le Rambam (Hilkhot Téchouva 7,4) : « Une personne qui a fait téchouva est aimée et chérie par D., comme si elle n’avait rien transgressé ».
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2°/ « Rivka, levant les yeux, aperçut Its’hak et se jeta à bas du chameau … [elle demanda à Eliézer : ] Qui est cet homme qui marche dans le champ » (‘Hayé Sarah 24,64-65)
Qu’est-ce qui a poussé Rivka à demander l’identité de Its’hak en le voyant pour la 1ere fois, sachant qu’elle n’a surement pas interrogé Eliézer concernant chaque personne qu’ils ont pu croiser pendant leur trajet?
-> Le Nétsiv (Haémek Davar 24,65) dit que la 1ere fois que Rivka a vu Its’hak, il était en train de prier.
Dans sa prière, il était si retiré de ce monde, qu’il apparaissait comme un ange, au point que Rikva a glissé de son chameau et s’est couverte par respect pour cette sainte personne.
Cette rencontre a tellement mis en elle du respect pour Its’hak, que durant toute sa vie elle sera incapable de se confronter à lui.
C’est pourquoi, par exemple, elle ne lui demandera pas le départ de Essav, comme Sarah avait pu le faire au sujet de Yichmaël, à son mari Avraham.
-> Le Mochav Zékénim, ainsi que le Panéa’h Raza, citent le midrach affirmant que Its’hak marchait à l’envers, avec ses pieds en l’air.
Ils expliquent que Avraham a blessé Its’hak au moment de le ligoter afin de l’offrir en sacrifice, et les anges l’ont ensuite pris au Gan Eden afin qu’il puisse récupérer et guérir.
Or, il est d’usage que les personnes revenant du Gan Eden marchent à l’envers (cf. Rachi Chmouël I 28,12).
=> Ainsi, Rivka remarquant cette façon inhabituelle de se déplacer, elle a demandé son identité à Eliézer.
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3°/ Rachi (v.23,2) écrit : Le récit de la mort de Sarah fait immédiatement suite à celui du sacrifice de Its’hak. Lorsqu’elle a appris que son fils avait été ligoté sur l’autel, prêt à être égorgé, et qu’il s’en était fallu de peu qu’il fût immolé, elle en a subi un grand choc et elle est morte.
La guémara (Pessa’him 8b) enseigne que ceux qui réalisent des mitsvot ne seront en aucun cas lésés du fait d’avoir fait une mitsva.
=> Comment est-il alors possible que la mitsva de la ligature d’Its’hak a pu entraîner la mort de sa femme bien-aimée?
-> Le rav ‘Haïm Kanievsky explique que l’intention de la guémara est que la réalisation d’une mitsva n’entraîne pas une souffrance supplémentaire.
Cependant, si le temps naturel de mourir d’une personne est arrivé et qu’elle est méritante, alors Hachem va faire en sorte qu’elle meurt pendant la réalisation d’une mitsva.
En effet, le midrach (Kohélet rabba 3,22) enseigne que celui qui fait une mitsva juste avant sa mort, est considéré comme ayant observé toutes les mitsvot de la Torah.
-> Le Mérafsin Igri est d’avis que Hachem protège une personne lorsqu’elle fait une mitsva, mais ce principe ne s’appliquait pas à la Akédat Its’hak, puisque son but était de tester le dévouement d’Avraham à Hachem, même dans les circonstances les plus difficiles.
Dans ce cas, la permission a été donnée au Satan pour rentre encore plus difficile cette situation : en montrant à Avraham que ses actions ont causé la mort de sa femme bien-aimée.
=> Alors que le moment de la mort de Sarah était arrivé, cela permettait en plus de magnifier l’épreuve et d’apporter à Avraham une récompense beaucoup plus importante.
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-> Rabbi ‘Hanan dit : celui qui en appelle au jugement contre son prochain sera jugé en premier, d’après les 2 versets : « Saraï dit à Avram : Que l’injure qui m’est faite retombe sur toi … Que Hachem juge entre moi et toi! » (Lé’h Lé’ha 16,5) et plus loin : « Avraham vint pour prononcer l’oraison funèbre sur Sarah et la pleurer » (‘Hayé Sarah 23,2).
[guémara Roch Hachana 16b]
-> Le Pné Yéhochoua enseigne :
Qui prouve que le décès prématuré de Saraï est une conséquence d’avoir invoqué le Ciel contre Avram? Peut-être son décès à 127 ans n’était-il pas une sanction, mais correspondait à la date prévue de sa mort?
Il n’en est rien, car dans le verset (‘Hayé Sarah 23,2), il aurait suffi d’écrire : « Avraham prononça l’oraison funèbre de Sarah » et l’expression : « Avraham vint (vayavo Avraham) semble apparemment superflue.
En fait, le texte veut nous enseigner, par l’expression: « Avraham vint » que cette arrivée n’était pas prévue, naturellement, car il était prévu dans le Ciel que c’est Sarah qui devait prononcer l’oraison funèbre au Ciel contre son époux, elle a diminué sa durée de vie (en invoquant le Ciel contre lui) et c’est donc son époux qui vint l’enterrer.
[ => Combien nous devons être vigilant à ne pas « appeler au jugement contre son prochain », car nous sommes alors « jugé en premier », et même pour notre Matriarche Sarah cela s’est terminé par une mort prématurée!! ]
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4°/ « Avraham vint faire l’éloge funèbre de Sarah et la pleurer » (‘Hayé Sarah 23,2)
Le Baal haTourim fait remarquer que la lettre kaf (כ) de : וְלִבְכֹּתָהּ (vélivkota – et la pleurer) est écrite dans la Torah plus petite que les autres lettres, afin de nous enseigner qu’il s’est autorisé à ne pleurer qu’une petite quantité.
Pourquoi Avraham n’a-t-il pas pleuré davantage sur la perte de sa femme bien-aimée?
-> Le Baal haTourim répond qu’il a peu pleuré parce qu’elle était déjà très âgée (127 ans!).
Par ailleurs, la guémara (Baba Kama 93a) enseigne que Sarah a été punie pour avoir demandé à Hachem de juger sa plainte contre Avraham (« Que Hachem juge entre moi et toi! » – Lé’h Lé’ha 16,5), faisant qu’elle allait mourir prématurément.
Etant considérée comme partiellement responsable de sa mort, il l’a pleuré avec moins d’intensité.
-> Le Darké Moussar fait remarquer que Avraham a voyagé pendant 3 jours afin de réaliser la Akéda le jour de Kippour.
Le temps qu’il retourne chez lui pour enterrer et prendre le deuil de Sarah, c’était la veille de Souccot, faisant que la période de deuil a été réduite à uniquement un seul jour. [puisque la fête interrompt le deuil, il ne lui restait pas beaucoup de temps pour la pleurer!]
Par ailleurs, puisque Sarah avait laissé un enfant très vertueux pour continuer dans son chemin, elle était considérée à un certain niveau comme toujours en vie. C’est pour cela qu’il a réduit les pleurs.
-> Le Kessef Nivchar, cite la guémara (Moed Katan 27b), qui enseigne qu’il faut pleurer un mort pendant 3 jours et prendre le deuil pendant 7 jours.
Après avoir mis pratiquement 3 jours pour revenir chez lui après la Akéda, il ne restait plus que quelques heures pour la pleurer.
-> Le Kéhillat Its’hak explique qu’en entendant que la Akéda a entraîné la mort de Sarah, Avraham n’a pas voulu pleurer excessivement d’une manière qui aurait pu être interprétée par autrui, comme l’expression d’un regret de la Akéda, à cause de ses conséquences.
En effet, la guémara (Kiddouchin 40b) enseigne que le fait de regretter d’avoir réalisé une mitsva ou bien de ne pas avoir fait une avéra, a le pouvoir d’annuler cette bonne action ou le fait de s’être retenu de fauter.
Le Pirké déRabbi Eliézer (chap.31) rapporte que sur le chemin aller, le Satan a mis une rivière (Avraham était sur le point de mourir noyé) et est également apparu sous la forme d’une vieille personne se moquant de ce qu’il s’apprêtait à faire. Ces plans n’ont pas fonctionné.
Le Kéhillat Its’hak dit qu’une fois la Akéda réalisée, le Satan a essayé de le faire regretter en montrant que la mort de sa femme Sarah était de sa faute (bien que son heure était arrivée), profitant de sa détresse émotionnelle, ce qui aurait alors comme conséquence d’annuler toute récompense à cette incroyable mitsva.
[« véasser aSatan milfanénou ouméa’harénou » – Retire le Satan de devant et de derrière nous – Prière Arvit]
-> Rabbi Shimshon Raphaël Hirsch dit que son chagrin était certainement immense, mais il n’a pas voulu exhiber sa souffrance, dissimulant la pleine mesure de sa douleur dans le fond de son cœur et dans l’intimité de sa maison.
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-> Il peut être intéressant d’ajouter que bien que le roi Chlomo soit considéré comme l’auteur du livre de Michlé, le midrach Tan’houma (‘Hayé Sarah 4) enseigne que le dernier chapitre de Michlé (31,10-31), qui est connu comme le : Eshét ‘Haïl (chant du vendredi soir), a été composé bien avant sa naissance.
En effet, à la mort de sa femme bien-aimée Sarah, Avraham a commencé à faire son éloge, et il a composé cette magnifique expression de son appréciation pour sa femme de grande valeur.
Le midrach explique en détail comment chaque ligne est une expression unique de louange pour un événement qui a pu se passer dans la vie de Sarah.
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+ Petits bonus (b’h) :
-> Le Pardes Yossef donne l’enseignement suivant :
« Selon le Pirké déRabbi Eliézer et le midrach Yalkout Chimoni, Eliézer le fidèle serviteur d’Avraham, n’était autre que le géant Og, qui est devenu par la suite le roi de Bachan (Og mélé’h aBachan).
D’après le Rachbam, il était tellement grand, qu’il avait besoin d’un lit spécial fait de fer afin de pouvoir supporter sa taille et son poids incroyables.
On comprend mieux pourquoi Eliézer a demandé à Rivka : « Y a-t-il dans la maison de ton père de la place pour nous, afin de passer la nuit? » (‘Hayé Sarah 24,23).
En effet, il était si immense, qu’il n’était pas certain de pouvoir rentrer dans la maison.
Mais il a été rassuré, lorsque Lavan lui a dit : « Pourquoi te tiens-tu dehors alors que j’ai débarrassé la maison » (‘Hayé Sarah 24,31) = maintenant qu’elle est vide, il y a de la place pour toi! »
[selon Rachi : J’ai nettoyé la maison = De toute idole]
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-> Il est écrit au sujet de 3 personnes, qu’ils avaient un visage ressemblant à celui de Avraham :
– pour Lot (Rachi – Lé’h Lé’ha 13,8) ;
– pour Its’hak (Rachi – Toldot 25,9) ;
– pour Eliézer (midrach Béréchit rabba 60,7). D’ailleurs, c’est pour cela qu’à son arrivée dans la maison de Bétouel et de Lavan, au début, ils pensaient à tort que c’était Avraham.