+ Questions/Réponses – Paracha Vayé’hi :
1°/ « S’il te plaît, ne m’enterre pas en Egypte » (Vayé’hi 47,29)
Une des 3 explications de Rachi est : les morts ensevelis hors de la terre d’Israël « vivent » dans la souffrance des migrations souterraines.
[Ils sont obligés d’endurer la souffrance de rouler à travers des tunnels pour atteindre la terre d’Israël pour la résurrection des morts]
Par ailleurs, la guémara (Kétoubot 111b) enseigne qu’au moment de la résurrection des morts, les tsadikim vont jaillir et se lever à Jérusalem.
=> Quel est l’intérêt de l’enterrer à ‘Hevron, si Yaakov devra quand même subir des souffrances pour atteindre Jérusalem?
-> Le Mérafsin Igri répond que ceux qui sont enterrés en dehors d’Israël devront rouler dans le sol jusqu’à atteindre Jérusalem, et là ils ressusciterons.
Par contre, ceux qui sont enterrés ailleurs qu’à Jérusalem, vont d’abord revenir à la vie là où ils sont enterrés, et ensuite ils pourront marcher normalement jusqu’à Jérusalem.
Cette cette 1ere douleur (rouler dans le sol) que Yaakov voulait éviter.
-> Le Arizal écrit qu’il existe une cavité souterraine qui relit directement la grotte de Ma’hpéla (‘Hebron) au Kotel. D’ailleurs, c’est par ce trajet que chaque veille de Shabbath, après le midi juif, nos Patriarches vont au Kotel.
On comprend mieux pourquoi, Yaakov ne s’est pas préoccupé d’être enterré à ‘Hebron.
-> Rav Dovid Twerski (le 1er Rabbi de Tolna) rapporte les paroles de nos Sages que si une personne est méritante, des anges Célestes vont amener sont cercueil jusqu’en terre d’Israël, au moment de la résurrection des morts, lui évitant ainsi les douleurs liées au déplacement.
De même, les anges vont retirer d’Israël ceux qui ne méritent absolument pas d’y être ressusciter.
=> Yaakov a insisté pour être enterré en terre d’Israël, car dans son énorme humilité, il ne se considérait pas comme un tsadik, ne méritant pas que les anges viennent l’apporter en Israël.
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2°/ Lesquelles des 12 tribus meurent avec davantage de maladies que les autres?
-> Rachi (v.49,22) commente : la descendance de Yossef est invulnérable au mauvais œil (guémara Béra’hot 20a).
De même, lorsque Yaakov a béni [les enfants de Yossef : ] Menaché et Efraïm (v.48,16), il a souhaité qu’ils se multiplient comme les poissons, sur lesquels le mauvais œil n’a aucune prise.
La guémara (Baba Métsia 107b) enseigne que sur 100 morts, 99 sont causées par le mauvais œil (ayin ara), et une seule l’est suite à des causes naturelles.
Les Tossefot font remarquer que puisque les descendants de Yossef sont protégés contre le mauvais œil, on aurait pu penser qu’ils vivent beaucoup plus longtemps que le restant des juifs, car étant immunisés contre 99% des causes de mort.
Cependant, dans la réalité nous ne constatons pas de différence de durée de vie entre les différentes tribus du peuple juif.
=> Les Tossefot suggèrent que lorsque le temps de mourir est venu pour un descendant de Yossef, Hachem le frappe alors d’une maladie qui lui sera fatale. C’est ainsi que ces derniers meurent beaucoup plus fréquemment de maladie que les autres tribus.
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[selon nos Sages, toutes les femmes égyptiennes regardaient Yossef, et lui ne les regardait pas.
Ainsi, pour se protéger du mauvais œil, il ne faut pas utiliser ses yeux négativement (choses interdites, jalousie, …), à l’inverse il faut avoir un regard positif (sur autrui, sur ce que l’on a dans la vie, …)]
-> b’h, dvar Torah sur la jalousie et le ayin ara : https://todahm.com/2018/12/09/jalousie-et-mauvais-oeil
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3°/ Combien de fois Yaakov a-t-il était enterré?
-> La michna dans Nazir (9,3) nous enseigne que si une personne transfert un corps qui a déjà été enterré, elle doit également prendre avec un peu de la terre qui est autour.
La guémara (Nazir 65a) déduit ces lois de la demande de Yaakov : « tu me transporteras hors de l’Egypte » (Vayé’hi 47,30), commentant que Yaakov a dit à Yossef de prendre également de la terre environnante avec son corps.
=> Selon le sens simple de cette guémara, Yaakov a d’abord été enterré immédiatement en Egypte après sa mort, et 70 jours plus tard, il a été déterré et ré-enterré à ‘Hevron.
-> Cependant, le Moshav Zékénim (et le Rambam) affirme que Yaakov n’a jamais été enterré en Egypte.
La guémara peut être comprise comme Yaakov demandant à Yossef de ne surtout pas l’enterrer en Egypte, car après il devront prendre de la terre de ce pays, ce qui leur donnera inutilement du travail supplémentaire.
-> Dans la Torah, d’abord les frères se sont assis en deuil pour leur père (v.50,10), et c’est seulement ensuite que « ses fils le portèrent au pays de Canaan et l’ensevelirent dans le caveau » (v.13).
Or, selon la loi juive (Choul’han Aroukh – Yoré Déa 375,1), la période de deuil débute au moment où l’on procède à l’inhumation et après la fermeture de la sépulture avec la terre. Dès cet instant, les proches doivent se conformer aux lois des endeuillés.
Selon le Panéa’h Raza, cela est en accord avec les paroles du ‘Hizkouni, qui maintient que Yaakov a été enterré d’abord en Egypte. En effet, cela explique pourquoi ils ont pu prendre le deuil sur sa mort avant de l’enterrer en Israël.
[« L’Egypte le pleura 70 jours » (v.50,3), après cette période Yossef demanda à Pharaon de lui permettre de réaliser sa promesse de l’enterrer en terre d’Israël.]
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-> Parmi les égyptiens qui se joignirent aux funérailles de Yaakov aucun ne mourut, ne tomba malade ou endura des souffrances durant cette année-là.
Ils eurent le mérite immense de porter le deuil d’un saint tel que Yaakov.
En effet, participer à de telles funéraires (d’un tsadik de la génération) revêt une importance considérable.
[Yalkout Réouvéni – rapporté par le Méam Loez (Vayé’hi 50,11)]
[en participant à l’enterrement d’un grand Sage de notre génération, nous méritons également d’énormes bénédictions.]
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4°/ Quelles sont les 4 personnes qui ont été enterrées dans cette paracha?
La Torah rapporte que Yaakov a été enterré à ‘Hevron (v.50,13).
Le midrach (Pirké déRabbi Eliezer 38) rapporte que Essav a essayé d’empêcher que Yaakov soit enterré dans la Méarat haMakhpéla, et qu’à un moment ‘Houchim ben Dan lui a coupé la tête, qui a roulé dans le caveau et y a été enterrée.
La paracha Vayé’hi se termine par la mort de Yossef (v.50,26), qui selon la quémara (Sotah 13a) son cercueil a été plongé dans le Nil.
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-> « Yossef retourna en Egypte, lui et ses frères, et tous ceux qui étaient montés avec lui pour enterrer son père, après qu’il eut enterré son père » (v.50,14)
=> Que vient nous ajouter : « après qu’il eut enterré son père » ?
Selon le Choul’han Arou’h (Yoré Déa 242,17), si 3 personnes marchent ensemble, la personnes la plus respectable doit être au milieu, la 2e plus respectable doit être à droite, et la 3e à la gauche.
Le Birké Yossef y ajoute que dans le cas où il n’y a 2 personnes marchant ensemble, celui qui est le plus honoré doit marcher à la droite, et l’autre personne à sa gauche.
La guémara (Yérouchalmi Taanit 4,2) rapporte que nos 3 Patriarches sont enterrés de cette manière, avec Avraham au milieu, Its’hak à sa droite, et Yaakov au gauche. Cependant, les Patriarches ne sont pas morts en même temps.
Lorsque Its’hak y a été enterré, ils n’étaient que 2, et ainsi il a été positionné à gauche de Avraham.
Cependant, dans notre paracha suite à la mort de Yaakov, ils étaient 3 personnes
Le Rogatchover Gaon explique qu’on a tout d’abord exhumé Its’hak de sa place, pour le faire passer de la gauche à la droite d’Avraham.
Ce n’est qu’ensuite, qu’ils ont pu enterrer Yaakov dans la parcelle qu’occupait avant Its’hak.
C’est ce que vient nous apprendre la répétition de : « pour enterrer son père, après qu’il eut enterré son père » » = il y a eu 2 enterrement : celui de Its’hak et de Yaakov.
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5°/ Pourquoi bénissons-nous nos enfants d’être spécifiquement à l’image de Efraïm et Ménaché, et pas d’autres tribus?
-> Rabbi ‘Haïm Yossef Kofman rapporte que selon nos commentateurs c’est la 1ere fois depuis la Création du monde, que tous les frères d’une famille s’entendent bien ensemble.
En effet, il y a eu : Caïn et Evel, Its’hak et Ichmaël, Yaakov et Essav, Yossef et ses frères.
Durant toute sa vie, Yaakov a pu se rendre compte des terribles conséquences de la haine et de la jalousie entre frères, et c’est ainsi lorsqu’il a vu l’amour profond et pur entre Efraïm et Ménaché, il a ressenti que c’est la bénédiction ultime que peut utiliser un juif pour ses propres enfants.
D’ailleurs, on peut noter que les noms : « Efraïm Ménaché » (אפרים מנשה) a une guématria de 726, qui est exactement égale à : « שים שלום » (Fais reposer la paix – shim shalom).
-> Yaakov a changé ses mains, en plaçant sa droite sur la tête de Efraïm, à la place de Ménaché qui est l’aîné, au point que Yossef dise : « Pas ainsi, mon père! Puisque celui-ci est l’aîné, mets ta main droite sur sa tête. » (48,18).
Yaakov va quand même mentionner le nom du plus jeûne avant celui de Ménaché, proclamant même : « son jeune frère sera plus grand que lui (l’aîné) » (48,19).
En tant qu’aîné et connaissant l’impact des paroles de Yaakov, Ménaché aurait pu bondir à ce moment, et protester : « Grand-père, ce n’est pas juste! C’est moi qui dois mériter cette bénédiction! Je veux ta main droite sur ma tête! »
Cependant, Ménaché n’a rien dit, et Efraïm ne s’est à aucun moment vanter de sa supériorité.
=> C’est ce type de relation que Yaakov souhaite à chaque famille juif dans le futur, au point qu’au moment de mourir Yaakov nous laisse comme héritage l’idée suivante : la plus grande source de plaisir des parents est de voir ses enfants vivre en paix et en harmonie l’un avec l’autre, à l’image de Efraïm et Ménaché.
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-> Le rav Zalman Sorotskin (Oznaïm laTorah) explique que toutes les autres tribus ont vécu de nombreuses années en terre sainte, dans un
environnement de sainteté, tous ensemble, auprès de Yaakov.
En revanche, Efraïm et Ménaché sont nés et ont évolué en Egypte, dans
ce pays dévoyé/impur, entourés de réchaïm.
L’Egypte symbolise l’exil par excellence. Mais l’assimilation ne les a pas touchés. Malgré tout, ces 2 enfants restèrent fidèles à la tradition de leur père, Yossef, et ne se fondirent pas dans la masse.
Or, nos sages disent qu’à la fin de sa vie, Yaakov vit, par prophétie, la date de la fin des temps, de la fin de l’exil. Quand il vit la longueur de l’exil et du fait que
pendant de très nombreuses années, ses descendants devront vivre en diaspora, dans des pays hostiles à la Torah, il souhaita à tous
ses descendants de ressembler à Efraïm et Menaché.
Même s’ils vivent dans des pays d’exil et d’impureté, il leur souhaita de parvenir malgré tout à conserver leur spécificité, et ne pas s’assimiler.
L’exemple type de celui qui évolue parmi les nations tout en restant fidèle à sa tradition, c’est l’exemple d’Efraïm et Ménaché, l’exemple à suivre pendant toutes les longues années d’exil.
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-> Le ‘Hatam Sofer explique que Efraïm et Menaché ont chacun une particularité.
En effet, nos Sages enseignent que Efraïm était le plus proche de Yaakov, après sa descente en Egypte. C’est lui qui étudiait tout le temps la Torah avec son grand-père. Ainsi, Efraïm symbolise celui qui se consacre à l’étude.
Par contre, Ménaché était plus proche de son père, Yossef, il l’aidait dans la gestion de l’état et s’occupait des richesses de l’Egypte. Ainsi, Ménaché symbolise celui qui s’implique dans le monde, à travers un travail, et qui
s’enrichit.
Yaakov savait que chaque parent souhaite ces deux caractéristiques pour ses enfants : qu’ils réussissent dans la Torah, mais aussi qu’ils réussissent professionnellement et qu’ils aient une bonne situation.
Cependant, l’essentiel de la bénédiction de Yaakov, ce qu’il voulait que chaque père transmette à ses descendants, c’est qu’il « place Efraïm avant Ménaché. » Certes, chaque père souhaite la orah et la richesse à ses enfants, mais l’essentiel, c’est que son ambition soit qu’en priorité, ses enfants soient des grands en Torah.
=> La richesse oui, pourquoi pas, mais la Torah c’est la priorité : Efraïm avant Ménaché!
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-> Le Rav Chlomo Bloch se rapporte à un principe selon lequel il existe une descente dans les générations (yérida adorot).
Plus les générations passent et plus la grandeur spirituelle diminue. La 2e génération étant moins grande spirituellement que la première.
Malgré tout, 2 personnes ont échappé à cette règle : ce sont Efraïm et Ménaché. En effet, Yaakov dit à leur propos : « Efraïm et Ménaché seront pour moi comme Réouven et Chimon » = c’est-à-dire que bien que Efraïm et Ménaché appartiennent à la génération suivante, par rapport aux tribus, malgré tout Yaakov les élève et les place au niveau des tribus, comme Réouven et Chimon, comme s’ils appartiennent à la génération précédente, puisqu’ils n’ont pas subi la diminution des générations.
=> C’est cela que chaque parent souhaite à ses enfants. Chaque père souhaite que son fils soit au moins aussi grand que lui, voire même plus.
Un parent désire profondément que ses enfants échappent à la règle de la diminution des générations et que tout au moins, ils l’égalent, et ce à l’image d’Efraïm et Ménaché.
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-> Le Ohr ha’Haïm haKadoch dit que Yaakov bénit Efraïm et Ménaché de tellement de bénédictions au point qu’il ne puisse y avoir de bénédictions supplémentaires.
=> Par conséquent, chaque parent qui souhaite toutes les bénédictions pour ses enfants, voudra les bénir à l’image de Efraïm et Ménaché, qui ont été bénis de toutes les bénédictions possibles.
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=> Pourquoi Yaakov a-t-il béni le plus jeune Efraïm avant son frère Ménaché?
-> Yossef avait épousé Osnat qui était la fille de Dina et du prince de Chékhem.
Osnat avait donc une moitié de sainteté (kédoucha) du côté de sa mère Dina, fille de Léa, et une moitié d’anti-sainteté du côté de son père.
Ménaché, le fils aîné de Yossef (totalement kadoch) et de Osnat, a pris du côté de sa mère sa moitié d’anti-sainteté et du côté de son père Yossef la moitié de sa sainteté.
Quant à son frère Efraïm, il a pris de sa mère Osnat la moitié de sainteté dont elle avait hérité et de son père Yossef l’autre moitié de sainteté.
Ainsi, contrairement à son frère aîné Ménaché, Efraïm était totalement saint (kadoch).
C’est pourquoi, lorsque Yossef amena ses 2 fils Ménaché et Efraïm auprès de son père Yaakov pour les bénir, en plaçant l’aîné Ménaché à la droite (en position prioritaire) de Yaakov, ce dernier permuta ses mains en posant sa main droite sur la tête d’Efraïm, le fils qu’il savait plus kadoch (saint) que son aîné.
De plus, c’est pour cette même raison que seule la moitié de la tribu de Ménaché est entrée en terre d’Israël et l’autre moitié est demeurée de l’autre côté du Jourdain ; par contre toute la tribu d’Efraïm a eu le mérite d’entrer en terre d’Israël.
[Ben Ich ‘Haï]